Nantes et Saint Nazaire : 2 villes tournées vers la mer


L'histoire de Nantes est intimement liée à celle de son port : principal acteur de l'histoire maritime française au XVIIè siècle, celui-ci s'est étendu vers l'aval au XIX°. C'est ainsi que Saint-Nazaire est né. Situé sur la façade atlantique nord de l'Europe, le Port Atlantique Nantes Saint-Nazaire occupe aujourd’hui une place stratégique au regard de la répartition des trafics maritimes. Retraçons les principales lignes de son histoire. 

Nantes : une ville historiquement indiscociable de son port.

A l’aube de l’histoire est citée la bourgade de Condivicnum, qui sera plus tard appelée Portus Namnetum puis Nantes. A l’origine le port de Nantes est situé au fond de l’estuaire de la Loire, à 56 kilomètres de l’océan, se fixant dans une succession d’îles enserrées par plusieurs bras de la Loire. 

Au XIII° siècle, se développent les routes  transatlantiques. Un accord entre le Roi d’Angleterre et le Duc de Nantes permet aux négociants Nantais d’accéder aux ports d’Outre Manche. La devise de Nantes apparue au XIV° siècle est « Favet Neptunus eunti  », Neptune donne ses faveurs à celui qui va, qui entreprend de partir.

 

Au XVII° siècle, Nantes est l’un des tous premiers ports du royaume, dont l’économie repose sur la pratique d’un commerce traditionnel reposant sur des denrées de consommation universelle: les vins de Loire, le sel venu des marais de Guérande et de la baie de Bourgneuf, ou encore poisson et blé. Sa situation géographique fait de Nantes l’interface entre le monde maritime atlantique en aval et le monde fluvial de la Loire en amont.

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Port de Nantes, 1785

Au XVIII° siècle, Nantes connaît son apogée. A cette époque, Nantes pratique déjà un commerce colonial avec les Antilles, mettant en place un trafic de tabac et de cultures nouvelles, telles que le coton, l’indigo, le rocou  et le sucre.

 

Mais aux XVIII° et XIX° siècles, le Port de Nantes doit surtout son apogée au trafic des négriers, pudiquement appelé commerce des Antilles. Si les origines de la traite se perdent dans la nuit des temps, l’invention du trafic négrier revenant aux arabes qui le pratique à partir du VII° siècle, la traite transatlantique quant à elle s’organise à partir de la seconde moitié du XVII° siècle. Le commerce triangulaire se déroulera en deux temps :  traite d’abord pratiquée au nom des besoins en main d’œuvre des colonies, autorisée et encouragée par l’Etat jusqu’en 1817 (Ordonnance Royale interdisant la traite des Noirs). Puis traite continuant de façon cachée et obscure, sous pavillon de complaisance, et qui fait l’enrichissement de plusieurs familles d’armateurs nantais.

 

Au XIX° siècle, tout en restant un grand port Sucrier (le sucre représente encore 60% de la valeur du commerce maritime au milieu du XIX° siècle), Nantes va se détourner du commerce colonial pour se tourner vers l’industrie. L’augmentation du volume de trafic et des tonnages rendent le chenal insuffisant. Le port de Saint-Nazaire est alors créé en 1857, à l’embouchure de la Loire. 

Au XX° siècle est mise en oeuvre une politique de dragages ininterrompus et de comblement de plusieurs bras de la Loire. L’aspect contemporain de la ville de Nantes, et du port de Nantes Saint-Nazaire apparaît alors. La première guerre mondiale modifie profondément l’estuaire, du fait des naissances des ports avancés de Donges et de Montoir, ports accessibles aux plus forts tonnages. 

Aujourd’hui le port de Nantes Saint-Nazaire peut être décrit  comme étant une succession de sites disséminés entre Nantes (fond de l’estuaire) et Saint-Nazaire (embouchure de l’estuaire), repartis entre la rive droite et la rive gauche de la Loire.

 

Le port de Nantes – Saint Nazaire aujourd’hui.

Image2.jpgL’estuaire s’organise alors autour de trois grands pôles, Saint Nazaire, Montoir- Donges et Nantes. Saint-Nazaire est le principal site de construction navale du port, du fait de la présence des « Chantiers de l’Atlantique » aujourd’hui rachetés par le chantier coréen STX. Le complexe de la construction navale comporte :

- le bassin à flot de Penhoët (1), l’un des plus vastes d’Europe. Il es trelié directement à l’estuaire de la Loire par l’écluse Joubert, comporte 3 formes de radoub, avec une forme de construction de 470m de long par 66m de large

 - la forme écluse Joubert (2), de 350m de long par 50m de large, utilisée pour le carénage des navires

- le bassin d’armement (3), 450m d elong par 95 m de large.

 

Les activités portuaires s'étendent sur plus de 60 km le long de l'Estuaire de la Loire et concernent aujourd'hui 4 sites, spécialisés sur différents types de trafics : 

  • Saint-Nazaire, avec ses terminaux fruitier, frigorifique et produits lourds,
  • Montoir, avec ses terminaux roulier, marchandises diverses et conteneurs, agroalimentaire, méthanier, charbonnier et sa plate forme multimodale,
  • Donges, avec ses sept postes pétroliers réservés à l'importation de pétrole brut et à l'exportation de produits raffinés (raffinerie Total).
  • Nantes, en fond d'estuaire, avec ses cinq terminaux et sa plate forme multimodale de Cheviré (terminal sablier, forestier…) connectée au réseau routier et embranchée ferroviaire.

 

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 Source : http://www.pays-de-la-loire.pref.gouv.fr/dossiers/dta/carte_dta.htm

 

 


La construction navale dans la région nantaise : symbole du glissement du port de Nantes vers l’aval de la Loire.

L’histoire du port de Nantes Saint-Nazaire est une succession de crises et de périodes fastes de croissance, rendant celle-ci chaotique. Le développement de la construction navale, activité majeure de la région en est tout à fait représentative. 

La tradition veut que Jules César ait fait construire ses trirèmes à Rezé (sud de Nantes) pour affronter la flotte Vénète. Plusieurs siècles plus tard, on retrouve la trace de chantiers navals place du Port aux Vins (aujourd’hui place du Commerce).

 

Mais c'est au XVIII° siècle le commerce triangulaire dynamise l'activité, relayé au XIX° siècle par l'industrie sucrière. On recense alors plus d'une centaine de chantiers navals.  

Au milieu du XIX° siècle, la surproduction, la concurrence britannique et la crise de l'industrie sucrière ébranlent le secteur momentanément. Plusieurs petits chantiers disparaissent avec l'utilisation du fer qui révolutionne le secteur. A la fin du XIX°, la politique d'aide de l'Etat relance le secteur. La concentration s'accélère et il ne reste plus guère que 3 gros chantiers à la fin de la première guerre mondiale :

- les Ateliers et Chantiers de la Loire (ACL)

- les Ateliers et Chantiers de Bretagne (ACB)

- et les Anciens Chantiers Dubigeon.

Pendant l'entre deux-guerres, les chantiers nantais construisent, avec les autres chantiers de la Basse-Loire, près de la moitié des navires français (de commerce ou militaires). Après la seconde guerre mondiale, la construction de dragues et de car-ferries permet de maintenir un niveau d'activité élevé. Mais à partir de 1955, la concurrence étrangère contraint l'Etat à commencer une vague de restructuration qui va durer près de 30 ans. Les Ateliers et Chantiers de la Loire (ACL) s'associent aux Chantiers et Ateliers de Saint Nazaire, aux chantiers Bretagne-Loire pour prendre le nom d'Ateliers de Nantes. En 1966, les ACB s’associent aux Ateliers de Nantes, avant de fusionner avec Dubigeon Normandie en 1969 pour devenir Dubigeon Normandie S.A. Ce chantier lance de nombreux car-ferries, cargos ,dragues et sous-marins.

Le 3 octobre 1987, le lancement du Bougainville pour la Marine Nationale marquImage5.jpga la fin de la construction navale nantaise, transférée aux Chantiers de l'Atlantique de Saint-Nazaire.

 

Lancement du Bougainville, le 3 octobre 1987, Chantiers Dubigeon, Nantes

 


Nantes et l’héritage du duché de Bretagne.

Image6.jpgL’histoire de la ville de Nantes ne peut être refermée sans parler du château des Ducs de Bretagne, témoin de l’appartenance de Nantes au duché de Bretagne. Ce duché sera officiellement rattaché en 1547 au royaume de France, lors de l’accession d’Henri II au trône de France (fils de François Ier et de Claude de France (fille de la duchesse Anne de Bretagne), Henri II sera le dernier duc de Bretagne). La duchesse Anne de Bretagne est une figure importante de l’histoire nantaise, son cœur est conservé au musée Dobrée à Nantes.

 

Château des Ducs de Bretagne à Nantes

 

Des industries nantaises célèbres.

 

Image7.jpgAvec la construction navale, d’autres industries ont connues un essor considérable à Nantes. Il nous faut mentionner les Biscuiteries et les conserveries. Pendant très longtemps, l'industrie du biscuit à Nantes se limite à la fabrication des biscuits de mer, grosses galettes de 180 grammes, par les boulangers de la Fosse. Les équipages réclament en effet des aliments capables de supporter de longs voyages. Ce n'est qu'en 1846 que Romain Lefèvre, se lance dans la fabrication de biscuits sucrés, comme le font les Anglais. C'est un succès, mais la vraie réussite est due à son fils Louis Lefèvre-Utile qui après avoir installé l'atelier familial quai Baco en 1885, lance la fabrication du célèbre "Petit Beurre LU". Devant la formidable réussite de LU, une seconde grande biscuiterie voit le jour en 1896 : c'est la BN (Biscuiterie Nantaise).

 

 

 

 

Au XIX° siècle, la ville devient en effet la capitale de la sardine et des légumes en boîte, grâce à Pierre Colin qui perfectionne le procédé d'Appert. En 1848, la conserve nantaise connaît une fulgurante expansion en nourrissant les pionniers de la Ruée vers l'or, aux USA. En 1884, la ville compte 24 conserveurs parmi lesquels Amieux, Saupiquet, Philippe et Canaud, Bouvais Flon, de Chancerelle et Benoist, Tirot, Cassegrain (qui sera maire de Nantes). A partir de 1950, la concurrence internationale mène à une concentration inévitable. Saupiquet sera la dernière conserverie nantaise en activité, fermant ses portes en 2005 après un rachat par le groupe Bolton.

Jules Verne : un romancier qui nourrit son inspiration de son enfance à Nantes.

La ville de Nantes vît aussi la naissance de Jules Verne en 1828. Voici ses souvenirs d'enfance et de jeunesse à Nantes, qui l’ont marqué et ont influencé ses romans.

 
Image8.jpgExtrait des Cahiers du musée Jules-Verne, n°10, Nantes, 1990.
 « [.]Je suis né à Nantes, où mon enfance, s'est tout entière écoulée. Fils d'un père à demi-parisien et d'une mère tout à fait bretonne, j'ai vécu dans le mouvement maritime d'une grande ville de commerce, point de départ et d'arrivée de nombreux voyages au long cours. Je revois cette Loire, dont une lieue de ponts relie les bras multiples, ses quais encombrés de cargaisons, sous l'ombrage de grands ormes, et que la double voie du chemin de fer, les lignes du tramway ne sillonnaient pas encore. Des navires sont à quai sur deux ou trois rangs ; d'autres remontent ou descendent le fleuve.
Pas de bateaux à vapeur, à cette époque, ou du moins très peu ; mais de ces voiliers dont les Américains ont si heureusement conservé et perfectionné le type avec leurs clippers et leurs trois-mâts goélettes. En ce temps-là, nous n'avions que les lourds bâtiments à voile de la marine marchande. Mais que de souvenirs ils me rappellent ! En imagination, je grimpais à leurs haubans, je me hissais à leurs hunes, je me cramponnais à la pomme de leurs mâts ! Mon plus grand désir eût été de franchir la planche tremblotante qui les rattachait au quai pour mettre le pied sur leur pont !
Mais avec ma timidité d'enfant, je n'osais ! Timide ? Oui, je l'étais, et pourtant, j'avais déjà vu faire une révolution, renverser un régime, fonder une royauté nouvelle, et bien que je n'eusse que 2 ans alors, j'entends encore les coups de fusil de 1830 dans les rues de Nantes où, comme à Paris, la population se battit contre les troupes royales. [.] »

 

Quelques spécialités nantaises (actuelles !)

Pour mieux connaître la région nantaise, quelle meilleure façon que de venir goûter au Petit Beurre LU, au berlingot nantais ou encore au Muscadet…

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